VIEL_KEVIN_Un-Reve-de-Millet-e1456504964672

Quai Branly : Un rêve de Millet à Paris

Le Musée du Quai Branly accueille la pièce de théâtre « Un Rêve de Millet » pour célébrer le Nouvel An chinois

Brève par Kevin Viel, diplômé de l’ENSA de Toulouse, architecte assistant chez ANMA, membre de France Chine International à Paris

À l’occasion du Nouvel An Chinois, différents événements ont eu lieu un peu partout dans le monde. À Paris, ville cosmopolite et forte d’un métissage culturel, le grand défilé attire chaque année presque 200 000 curieux. Autour de cette grande manifestation, gravitent de nombreuses actions mettant en valeur la culture chinoise. L’association Hybridités France-Chine a ainsi organisé des représentations théâtrales sous le haut patronage du Ministère chinois de la Culture et de l’ambassade de Chine en France. Le 5 février 2016, « Un Rêve de Millet » était joué au théâtre Claude Lévi-Strauss du Musée du Quai Branly. Vous avez loupé cette pièce ? Point de remord : l’équipe France-Chine International était au premier rang, nous vous racontons tout. 

« Une minute suffit pour lire un ancien poème chinois,
Une heure pour cuire un délicieux pot de millet,
Un siècle pour connaitre les recoins de l’existence …
Un millénaire pour dialoguer de la philosophie chinoise »

 

Installation lumineuse « L’Ö » de Yann Kersalé – Musée du Quai Branly Paris – photo ©Evelyne Ollivier – 3 Janvier 2013

Il fait déjà nuit lorsque nous traversons le jardin du Musée du Quai Branly. Quittant peu à peu le monde urbain, c’est une invitation à la méditation que nous propose l’artiste breton Yann Kersalé avec son installation lumineuse intitulée « L’Ö ». Une multitude de petites lumières fluorescentes se cachent dans la végétation foisonnante. Le voyage commence. Nous descendons ensuite dans les profondeurs du Musée, un brouhaha général trahit l’excitation des spectateurs dans l’amphithéâtre. Puis, tout-à-coup, le silence se fait et la salle devient sombre. Un homme habillé de noir traverse le public pour rejoindre la scène. Il commence alors à nous conter une histoire. Mais pas n’importe quelle histoire : « Un Rêve de Millet ».

Sur la scène, un jeune homme rencontre un taoïste, il se plaint de sa vie misérable auprès de ce dernier. Le vieux taoïste lui donne un oreiller, le jeune homme pose sa tête dessus, se couche, fait un rêve, sa vie s’écoule… Une vie glorieuse, où celui-là même, qui n’était qu’un pauvre paysan allant travailler aux champs, épouse la plus belle femme du village, puis est reçu aux examens nationaux, de succès en succès, le menant dans les cours impériales au bout d’une cinquantaine d’années. Il apprend la fierté, puis découvre la soif du pouvoir, la concurrence et les coups bas pour arriver aux faveurs de l’empereur.  Toutes ces péripéties sont rythmées par des instants de combat, d’amour et de poésie, entre cinq acteurs jouant de multiples personnages, le tout bercé par la musique de SHI Zhuodong et ses instruments traditionnels. Bien plus qu’un simple rêve, le spectacle porte avant tout une morale. Le rythme de la pièce s’intensifie jusqu’à ce qu’il se réveille : le millet est cuit.

À l’origine, « Un Rêve de Millet » apparaît dans le recueil de romans fantastiques sur le rêve de la dynastie Tang, intitulé Histoire sous un oreiller (枕中記 Zhěnzhōng jì). Cette création contemporaine de HUANG Ying qui s’inspire de la forme du Xiqu (戏曲 Xìqǔ – l’opéra chinois, ses voix si particulières et sa gestuelle unique) est une tentative artistique qui cherche à allier la tradition et la modernité, le monde réel et le monde spirituel.

HUANG Ying explique son intention par la volonté de revisiter le mouvement théâtral qui est apparu au XXème siècle en Chine, sous l’influence de jeunes talents chinois en théâtre, arts plastiques et architecture ayant été diplômés en Europe.

« L’art incarne le caractère d’une nation, il est aussi universel. Il ne peut pas montrer son originalité et sa particularité sans le premier, il ne peut pas être compris et apprécié sans le dernier »

ZHAO Taimu, introduction de l’article « Théâtre de la nation » (国剧 Guójù), Journal du matin, Pékin, 1926.

 

Le metteur en scène d’« Un Rêve de Millet » a souhaité revisiter ce mouvement. Cela lui permet non seulement de réinventer l’esthétique traditionnelle ou la technique théâtrale, mais aussi de mieux appréhender et retrouver une identité culturelle propre à la scène chinoise.

Enfin, après cette petite leçon de vie, la magie du théâtre laisse place au partage. En effet, depuis le début de la pièce, plusieurs autocuiseurs ont été allumés, laissant s’échapper un brin de vapeur continu. Le millet est donc prêt. Le metteur en scène et les acteurs invitent tous les spectateurs à venir goûter le fameux mets. Après une scène délicieuse pour les yeux et les oreilles, c’est notre palais qui, à son tour, se régale.

Quelques mots sur l’Association Hybridités France-Chine

Hybridités France-Chine est co-fondée par Christian BIET, professeur en Études théâtrales à l’Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense, co-directeur de l’EA 4414 « Histoire des arts et des représentations » et membre de l’Institut Universitaire de France, et WANG Jing, médiatrice culturelle, dramaturge, productrice, conseillère artistique de nombreux festivals, et chercheuse.

L’association a pour but de favoriser les échanges franco-chinois entre les professionnels du spectacle et les enseignants-chercheurs universitaires spécialistes du théâtre. L’association permet la réalisation et la production d’actions artistiques en France et en Chine : représentations, coproductions, colloques, journées d’études, ateliers, stages. Elle est essentiellement tournée vers la création et la recherche. Hybridités France-Chine a déjà organisé et accompagné de nombreuses manifestations de spectacles vivants entre les deux pays, parmi lesquelles figure la pièce « Un Rêve de Millet », représentée en France à l’occasion du Nouvel An chinois.

Contributeur : Kevin Viel, membre de France Chine International
Intégration et SEO : Yvane Abiven, membre de France Chine International
Photo à la une : Discours du metteur en scène Huang Ying – février 2016 ©Kevin Viel
Rédacteur en chef : Evelyne Ollivier-Lorphelin
Directeur de la publication : Yannick Morin, Président de France Chine International

Leave a comment